Je répétai cet enchainement à voix haute après les avoir notés.

Cassie se détourna du rayonnage qu’elle scrutait.

« Tu as trouvé quelque chose ?

- Je sais que ça n’a pas de sens mais il faut que je vérifie quelque chose. »

D’un geste j’ai sortis mon ordinateur portable de mon sac et consultai le catalogue de la bibliothèque universitaire.

Déception.

Ma découverte ne correspondait à aucun code.

Cassie qui observait par dessus mon épaule saisit l’ordinateur, le tourna vers elle sans un mot et changea de site internet.

« Voilà, fit-elle après une petit minute. Département des archives municipales, 3ème étage. Ce n’est pas un livre et ils ferment dans une heure. Tu me suis ? »

Une fois de plus elle me bluffait. Un peu long à réagir, je rassemblai néanmoins mes affaires et quittai le département d’histoire et de mythologie à sa suite.

Comme je ne bronchais pas, elle empila elle-même les ouvrages et entreprit de les replacer sur les étagères.

« Que fais-tu ? m’emportai-je. Je n’ai même pas eu le temps de lister les thèmes traités dans ces livres.

•  Je pense que seule la légende des Parques importait. Et ce qu’elle nous apprend c’est que nos vies peuvent s’interrompre à tout instant, alors il ne faut négliger aucune idée. Ne perdons pas notre temps à des lectures inutiles. Hannah n’utiliserait pas deux fois le même truc. »

J’aidai Cassie à reposer les livre sur les étagères en fonction de leur cote en prenant soin de ne pas les pousser contre la cloison de bois pour qu’ils demeurent en avant.

L’un des ouvrages était si lourd qu’il me donnait du fil à retordre, même à moi et je me retrouvai nez à nez avec l’étiquette de sa tranche. « 213.87.2 »

Six chiffres. Un éclair me traversa.

Une bibliothèque se constituait de 6 étagères. Je reculais d’un pas.

1 livre sur la première. 3 sur la seconde. Aucun sur la troisième. 7 sur la quatrième, 4 puis 3 sur les deux dernières.

« 130.74.3 »

Je perdais pied, le sol devenait mou. J’essayais d’avoir les idées claires mais rien de cohérent ne me venait à l’esprit. Il m’était impossible de lire tous ces livres pour comprendre, Hannah serait déjà tellement loin, peut-être en danger… Je plongeai la tête dans mes mains.

Cassie tentait de rester pragmatique :

« Hannah a toujours aimé les énigmes, les codes et tout ce qui s’y rapporte. Il n’est pas si dur de produire de fausses fiches dans le but de construire un jeu de piste… »

« C’est étrange… fit Cassie en comparant les fiches. L’écriture est parfois ancienne, comme écrite à la plume. Et la date n’est pas visible. »

Cassie examinait d’un air contrarié la pile de livres. J’hésitai un instant à lui faire partager ma découverte tant elle me glaçait le sang.

« Aucune date n’est lisible, dis-je lentement. Mais sur celui-là, l’emprunt suivant date de 1987. 1965 pour celui là. »

J’avais la chair de poule, n’osais plus toucher aux autre volumes. Alors j’entendis Cassie murmurer :

« 1946… »

Nous partageâmes un regard d’effroi.

Partout, le même nom « Hannah Reeves » et une date malencontreusement effacée par une goutte d’eau, des dizaines d’années auparavant.

Les fiches étaient parfois si vieilles qu’elles manquaient de s’effriter quand je les touchais, mais j’eus la chance de trouver des inscriptions plus récentes sur certaines d’entre elles. Lorsque je vis à plusieurs reprises le nom de mon amie dans la liste des emprunteurs mon coeur manqua un battement. Cassie devait ressentir la même chose, ouvrant grand les yeux de temps en temps et ajoutant un livre à la pile qu’elle tenait dans les bras.

Lorsque nous eûmes épluché tout le rayon, trouvant une petite vingtaine de livres portant la mention « Hannah Reeves » nous laissâmes tomber notre butin sur une table voisine.